Arrêt « Peter Nowak contre DPC » du 20 décembre 2017 (CJUE)

Sans surprise, la CJUE a rappelé au Commissaire à la protection des données irlandais (Data Protection Commissioner – DPC) que les copies d’examens comportent des données à caractère personnel. Pendant longtemps, la doctrine irlandaise en la matière était de considérer qu’elles ne relèvent pas du droit des données personnelles.

L’argument du DPC est étonnant de naïveté pour une institution au fait du droit des données personnelles, puisqu’il consiste à dire qu’au moment de la correction, l’examinateur fait face à une copie qui lui est anonyme. Ce faisant, il oublie que la notion de donnée à caractère personnel recouvre les données liées à une personne physique directement ou indirectement identifiée ou identifiable … et que donc dès lors que, de toutes façons, l’institution organisant l’examen est capable de faire le lien entre une copie et le candidat, on est en présence de données à caractère personnel.

Ceci aurait pu faire de cet arrêt un simple arrêt d’espèce sans grand intérêt, mais il contient cependant quelques précisions et rappels intéressants sur des sujets comme le droit d’accès, le droit à la rectification, ou encore sur les durées de conservation (que vous retrouverez dans la dernière édition du guide de la jurisprudence).

Notons enfin que l’Avocat général soutenait, reprenant ainsi les arguments de M. Nowak, ainsi que des gouvernements polonais et tchèque, selon lequel «des réponses rédigées à la main contiennent des informations supplémentaires sur le candidat, à savoir sur son écriture. Une copie manuscrite constitue dès lors, en pratique, un échantillon d’écriture qui pourrait ultérieurement servir d’indice, au moins potentiellement, pour vérifier si un autre texte est également de la main du candidat. Elle peut ainsi fournir des indications sur l’identité de l’auteur de la copie.» [1]Conclusions de l’avocat général, pt. 29. Or, « le point de savoir si un tel échantillon d’écriture permet d’identifier l’auteur de manière certaine importe peu aux fins de la qualification en tant que données à caractère personnel. En effet, de nombreuses autres données à caractère personnel ne permettent pas non plus, à titre isolé, d’identifier une personne de manière certaine. » [2]Conclusions de l’avocat général, pt. 30.

La Cour a suivi l’Avocat général sur ce point, puisqu’elle indique qu’ « en cas d’examen rédigé à la main, les réponses contiennent, en outre, des informations sur son écriture » [3]Au point 37 de l’arrêt depuis quelques jours, et que dans une première version mise en ligne de son arrêt, elle écrivait :  « en cas d’examen rédigé à la main, les réponses contiennent, en outre, des informations calligraphiques » [4]J’ai pris en photo l’ancienne version du texte, que j’avais imprimée en décembre, à côté de la version qui s’affiche maintenant à l’écran.

Est-ce que pour autant il s’agit forcément d’une donnée biométrique ? Ou d’une donnée personnelle ? Tout document écrit à la main quel qu’il soit comporte-t-il par son seul caractère manuscrit des données à caractère personnel ? La Cour ne nous dit rien de plus, et l’Avocat général se contente d’ajouter : « Il n’est donc pas nécessaire de trancher le point de savoir si l’écriture est à considérer comme une information biométrique. » [5]Au point 30 de ses conclusions générales

Pour conclure, notons que la question de savoir si des copies d’examen au format papier constituaient un fichier ou bien des données ayant vocation à entrer dans un fichier n’a (étonnamment) pas été soulevée par qui que ce soit, aussi la CJUE n’a pas été amenée à se préciser sa doctrine sur cet élément important de détermination du champ d’application matériel de la directive 95/46/CE.

Télécharger la version mise à jour du guide de la jurisprudence

Laisser un commentaire